Psychanalyste

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Il arpentait silencieusement les couloirs sombres de ce lieu qui lui était tant familier. Autrefois chaleureux et rempli de vie, ce n'était plus aujourd'hui qu'un refuge pour des âmes tourmentées en quête d'une nouvelle vie. Il décortiquait du regard les nombreuses pièces devant lesquelles il passait, relevant sans cesse des différences subtiles avec à ce qu'il en avait connu il y a longtemps. Il était toutefois incapable de les définir exactement : était-ce simplement un coup de peinture ou un réaménagement des meubles ?

Au fur et à mesure qu'il avançait, la réponse s’éclaircissait, il se demandait même comment il ne s'en était pas rendu plus tôt puisque après tout... même l'architecture du lieu n'avait en vérité plus rien à voir. C'était un autre Pataplume. A la fois nouveau et ancien, à la fois connu et étranger. Il était cependant capable de s'y orienter sans la moindre hésitation, guidé uniquement par son instinct. Une personne qui n'avait jamais connue cet endroit et qui voudrait le profaner de ses pas s'y perdrait très probablement pour toute l'éternité, ou du moins jusqu'à ce que son esprit soit totalement écrasé par la démence qui règne entre ces murs et que sa raison brisée en morceaux finisse par le pousser au suicide. Oui, il s'en rappelait maintenant, ce lieu était comme ça... Un lieu maudit qui dévorait la lucidité de quiconque y posait les pieds. Seule une poignée d'élus, dont lui, était insensible à ce malheur.

Après quelques minutes à parcourir ce dédale obscur, sa marche s'acheva enfin devant une porte particulière. Elle cachait derrière elle une pièce renfermant des secrets si lourds que même elle semblait vous inviter à fuir. Il arbora un sourire illuminant son visage. Il l'avait finalement retrouvée, après tant d'années... Son précieux cabinet. Il murmura alors pour lui-même :
- Le Psychanalyste est de retour.

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Quilby releva la tête. Quelqu'un parcourait les sinueux couloirs de Pataplume. Les pas semblaient sereins. Pourtant lors de la construction il avait veillé à ce que l'âme du lieu soit malsaine au possible. Pour réussir cet exploit il avait dû grossièrement mutiler le cadavre que BicBrother avait laissé pourrir. Il avait fait de ce prélèvement le cœur même de son nouveau Pataplume. Quand Roku et lui eurent fini la construction, ils avaient remarqués que tout avait fonctionné au delà de leurs espérances. Pataplume avait gardé ses souvenirs. Ses couloirs vivants étaient capables de reconnaître les anciens.
Mais qui était-ce ?
Quilby se laissa guider par sa création. Il sourit en voyant les mots sur la porte.
Il frappa. Durant toutes ses années, il avait apprit qu'il valait mieux ne pas surprendre les pensionnaires.
Il ouvrit la porte :

– Ça fait plaisir de te revoir !! Depuis que j'ai laissé tombé, on manquait de docteurs par ici !

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Depuis son bureau il entendit des bruits de pas se rapprocher de son cabinet. Il pensa tout d'abord que c'était une âme en détresse désirant rendre ses jours futurs paisibles, mais il nota ensuite que sa cadence de marche était beaucoup trop régulière et soutenue. C'était quelqu'un qui savait où il allait... un habitué de ces lieux. Il se releva alors et fixa la porte, prêt à accueillir l'individu d'un regard lumineux et d'un sourire chaleureux. Après quelques secondes elle s'ouvrit, révélant une silhouette dans la pénombre du couloir qui lui était bien familière. Il laissa toutefois échapper une brève grimace de doute en la voyant entrer dans la pièce et s'approcher de lui, les traits de son visage se dévoilant maintenant à la lumière du jour. L'homme qui se tenait devant lui lui était véritablement familier mais il lui semblait en même temps inconnu. Ce sentiment se renforça en écoutant ses paroles.

- Docteur ? répéta-t-il dans sa tête, sceptique.

Il observa très rapidement sa tenue, sa façon de se tenir, sa façon de parler, son ton et une myriade de détails qui peuvent être anodins et insignifiants pour une personne lambda mais qui, pour un individu habitué à analyser son entourage, un psychanalyste expérimenté tel que lui, sont bien plus parlants que toute autre chose. Une courte demi-seconde lui fut suffisante pour lever le voile du doute.

- Hmm... Je vois qu'il n'y a pas que cet endroit qui a changé. Bienvenue dans mon cabinet, Docteur. Ça fait très longtemps, en effet. déclara-t-il, souriant, avant de marquer une brève pause pour dévisager son interlocuteur. J'ignore quelle magie vous avez utilisée pour transformer ces lieux, mais est-il possible que vous ayez utilisé la même sur vous ? lui demanda-t-il en riant amicalement.

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– Alors tu te souviens ?

Quilby regarda longement son compagnon. Il était exactement comme dans ses souvenirs, tel une sauvegarde d'un ancien forum

– Disons que quand l'administration de BB est tombée il a fallut quelqu'un pour reprendre la relève, continua-t-il. Je crois bien que c'est à ce moment là que je me suis transformé. Plus personne ne m'a appelé Docteur depuis bien longtemps...

Il pris un stylo sur le bureau, inspecta la mine puis le reposa.

– Comme tu peux le constater tes quartiers ont été restaurés à la perfection. Mais bon tu sais tout n'est pas pareil non plus. J'aime m'imaginer que depuis la rénovation, Pataplume est devenu plus subtile.

Le bâtiment se mit à trembler, probablement pour démentir cet affreux mensonge.

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- Oui, tout est à la fois identique et si différent en même temps, c'est la première fois que je ressens une telle chose. Ce lieu est véritablement unique, il n'y a aucun doute à avoir dessus, c'est d'ailleurs ce qui fait son charme.

Il marqua une longue pause, pensif, avant de reprendre :

- Vous m'avez dit un instant qu'on ne vous appelait plus Docteur... Comment devrais-je vous appeler alors ? demanda-t-il, curieux.

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– Je pense que Quilby devrait aller. Mais si tu as autre chose en tête tu peux toujours proposer.
Il marqua une pause
– ET je pourrait toujours refuser !
Quilby eut un grand éclat de rire.
– Je te fais visiter ? ajouta-t-il.

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Il ouvrit un tiroir de son bureau, y plongea sa main et en ressortit une pancarte qu'il alla accrocher à sa porte, juste en dessous de la plaque affichant son nom. Puisqu'un psychanalyste ne pouvait pas se permettre de faire patienter inutilement ses clients, il se devait de les avertir lorsqu'il allait s'affairer loin de son cabinet. C'est pourquoi il venait placer cet écriteau "Absent". Il se retourna vers son collègue docteur.

- Très bien Quilby. Il est vrai que je ne me suis pas donné le temps d'apprécier ce nouveau Pataplume. Je vous suis. déclara-t-il, joignant le geste à la parole en tendant son bras vers le couloir pour inviter son ami à initier la marche.

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Quilby sorti du bureau et attendit que son ami ferme son cabinet à clé.
– Je ne sais pas trop par où commencer.
Les murs se mirent à vibrer et le couloir s'allongea. Des portes apparurent sur les murs.
– Et voilà Pataplume qui veut voir si tu peut toujours te repérer quand il bouge, rit-il. Sacré Pata !
Quilby claqua des doigts. Une arche s'ouvrit en face de lui.
– Si tu veux bien me suivre.
C'était un long tunnel et il ne semblait pas très bien éclairé. Après quelques minutes de marches, les deux compères arrivèrent devant un escalier en colimaçon.
– Je vais te laisser décider. Plutôt en haut ou en bas ?

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- Allons allons Quilby, tu es censé être le guide non ? taquina-t-il en riant. Enfin, soit, ça peut être amusant.

Il s'arrêta un instant, marquant une longue pause de réflexion.

- Hmm... Pourquoi pas le bas ?

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– Tu te souviens de ce qu'il y avait en bas ? C'est pour ça que tu veux y retourner. Je ne te pensais pas comme ça !
Quilby rit.
– Pata on descend !
Le sol se déroba sous les pied des deux amis. Il chutèrent pendant de longues minutes.
– Pense bien qu'on va devoir remonter tout ça !
Le Psychanalyste atterrit en premier. Quilby suivit. S'ils ne s'étaient pas blessés, c'est parce que le sol était mou, très mou, trop mou. Ils commençaient à s'enfoncer.
– Je ne sais pas ce que Kidas a laissé traîné mais c'est étrange. Ça faisait longtemps que je n'était pas descendu à la cave. Ça va ? Pas trop peur ? se moqua Quilby

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Pendant sa chute interminable, il observa longuement l’expression de son compagnon d'infortune. Ce dernier connaissait parfaitement ces lieux, cela ne faisait aucun doute puisqu'il en était le créateur. Il savait pertinemment ce qui les attendait tout en bas, d'autant plus que sa sérénité ne se détériorait pas au fil des mètres parcourus. C'est pourquoi il restait lui aussi parfaitement calme, arborant son éternel air placide. Dans un échange de regard, il lui sourit. L'atterrissage allait se faire en douceur, c'était une évidence...

...

...

// SPLAAAATCH //

...

Un véritable marécage nauséabond. Un enfer empestant la luxure et qui semblait presque vivant, capturant, engloutissant et noyant les personnes qui y plongeaient comme les araignées qui piégeaient leurs proies dans leur toile avant de les dévorer. Il se releva, avec plus ou moins de difficultés, soupirant longuement en voyant l'état de ses vêtements. Le son de son corps se décollant du sol n'était d'ailleurs pas spécialement rassurant non plus. Le liquide non identifié lui arrivait tout en haut des mollets. Il s'avança vers Quilby, lui tendant sa main pour l'aider à se redresser.

- Dépêchons-nous avant de rester bloqués ici.

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– Pas besoin de t'inquiéter : Kidas n'est pas à la maison. Tu imagines bien que je ne t'aurais jamais amené ici si je savais qu'iel était là. J'espère juste que son retour attendra qu'on remonte. Je suis pas d'attaque à croiser notre modo dans son milieu naturel.
Quilby commença à avancer.
– Tu sais qu'on est pas tout en bas ? Il y a encore l'étage de notre démon préféré. Ça fait longtemps que je ne l'ai pas vu. Je me demande comment il va.
Quilby désigna une trappe au sol.
– Regarde une des entrées est là. Par contre cette fois-ci je préfère passer devant. Je ne suis pas sûr de ce qu'on peut trouver. Darkounet a tendance à laisser traîner des artefacts partout.
Quilby descendit dans la trappe. La descente fut courte. Il atterrit dans un long corridor éclairé par des torches. Pas de portes. Des flammes bleues. On n'en voyait pas le bout.
– Sacré mégalo, murmura Quilby. C'est bon tu peux descendre, lança-t-il au Psychanalyste resté en haut.